ZARCO VEUT RASSURER HONDA : "C'EST OBLIGé QUE çA FONCTIONNE"

Au sortir d'un Grand Prix du Portugal avare en satisfactions, Johann Zarco garde malgré tout le sourire. Sa bonne humeur semble à toute épreuve en ce début d'année, alors qu'il affronte l'un des défis les plus complexes de sa carrière, celui de prendre une part active au développement de la Honda qui, depuis 2020, s'est effondrée dans la hiérarchie d'un championnat MotoGP que son pilote star, Marc Márquez, remportait l'année précédente. La blessure de l'Espagnol et le coup d'arrêt porté par le Covid au travail des constructeurs japonais ont laissé des traces, tandis que les marques européennes poursuivaient leur ascension, ainsi que leurs innovations aérodynamiques, aujourd'hui un accélérateur de performance.

Douzième au GP du Qatar, à 18 secondes du vainqueur, Johann Zarco a glissé au 15e rang au GP du Portugal, à 38 secondes cette fois. L'an dernier, au guidon de la Honda, il avait terminé l'épreuve de Portimão au pied du podium, c'est dire si la dégringolade peut être rude. Pourtant, le Français affiche résolument sa grande confiance dans l'avenir, porté par la qualité du travail auquel il assiste chez Honda.

"Je l'ai dit aux Japonais dimanche soir, au meeting : 'C'est obligé que ça fonctionne parce que vous êtes des ingénieurs, vous êtes les numéro 1 au Japon'. Pour être ingénieurs du projet MotoGP au Japon, ça veut dire que les mecs savent calculer, quoi ! Ça n'est pas un pilote qui va leur dire comment compter", a-t-il expliqué pendant la conférence de présentation du GP de France MotoGP, qui s'est tenue à Paris dès le retour de l'épreuve portugaise.

"Et je les ai rassurés en leur disant : 'On avance, ce Grand Prix était très compliqué, mais ça doit marcher'. Ils ont su le faire avant, ils vont le faire bientôt. Il faut avoir du recul sur la situation, sinon on a tendance à trop vite s'enterrer. Il ne faut pas trop regarder la position, plus regarder les chronos. On est 20e mais à seulement une seconde, ça n'est pas grand-chose à ce niveau-là."

Johann Zarco avait le sourire lors de la présentation du GP de France, mardi à Paris.

Photo de: PhotoPSP / Lukasz Swiderek

Prendre du recul sur la situation au regard d'un retard global qui n'est pas si négatif, c'est effectivement l'élément que Johann Zarco a voulu garder à l'esprit tout au long du week-end, alors que les quatre Honda trustaient le bas du classement. La typologie de la piste peut aussi avoir contribué à assombrir la performance générale des RC213V, de toute évidence en grande difficulté dès que l'adhérence est précaire.

Le comportement de l'arrière de la moto et le manque de grip que parvient à prendre la roue, voilà le problème unanimement pointé par les pilotes Honda, et il n'est pas récent, même s'il semblait possible de le compenser par d'autres forces il y a encore quelques saisons. "On patine, on bouge beaucoup", décrivait Zarco pendant le week-end portugais, admettant que les modifications apportées depuis l'an dernier n'ont pas vraiment inversé la tendance pour le moment. "On voit qu'il y a plein de changements, mais dans le comportement, on dirait qu'elle ne trouve pas son rail en entrant dans le virage, elle a toujours tendance à vouloir bouger. Le temps qu'elle bouge, les autres passent le virage, et ça c'est le souci. Pourquoi ce comportement de l'arrière est-il si compliqué ? Ils sont en train de chercher."

La moto bouge en entrant dans les virages, puis la manière dont elle accélère pénalise encore les pilotes en sortie, la Honda n'utilisant pas assez efficacement l'adhérence du pneu arrière à la relance. Le Provençal le décrit comme l'élément principal qu'il recherche : "Parce que dès que je prends les gaz en main, je sens que je perds beaucoup de temps par rapport aux autres."

"En général, j'ai toujours moyen de suivre quelqu'un. Même si parfois on n'est pas à l'aise sur la moto, on peut s'accrocher et on arrive à suivre. Mais, par exemple, au Portugal ça n'était presque pas possible de suivre les mecs de la dixième ou 12e place, et ça, pour moi, ça vient vraiment de cette manière d'accélérer et d'aller vers l'avant. C'est ce qui nous fait un peu défaut." Et le Français d'évoquer un ressenti unanime de la part de tous les pilotes Honda : "Selon les styles, on peut parfois se plaindre un peu de choses différentes, mais quand on fait vraiment le résumé de tous les commentaires, ça se rejoint."

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Première étape : récolter des informations

Le constat est donc clair, ce qui permet d'éviter les zones de flou et de se focaliser sur la recherche de solutions. En cela, Johann Zarco salue les efforts investis par Honda et la qualité d'expertise des ingénieurs mobilisés sur le sujet. Ce travail avec les ingénieurs, "ça [lui] plaît". "Tu sens qu'ils ont besoin de tout contrôler, un peu comme moi dans le pilotage. J'ai besoin de comprendre pour pouvoir me libérer, et eux c'est pareil. Parfois, on essaye des choses et il n'y a pas vraiment de mieux, pas vraiment de moins bien non plus, mais ce sont des infos qu'ils arrivent à récolter."

"Et j'ai une grande confiance dans les Japonais. Ils sont connus pour être des travailleurs et on voit que ça travaille vraiment d'arrache-pied. Ça me plaît parce que maintenant, j'arrive à avoir la maturité pour ne pas me démolir en cas de mauvais résultat ou de contre-performance, mais je crois aussi en cette récolte d'informations pour avancer."

Voilà la place qu'occupe Johann Zarco dans ce travail, celle d'un fournisseur d'informations aussi précises que possibles. "Je suis très constant dans ce que je donne sur la moto, donc mes commentaires sont très clairs", soulignait-il à Portimão. "La meilleure façon d'aider l'équipe, pour moi, c'est d'expliquer, en tant que pilote, ce que je fais sur la moto et le problème que j'ai. Du coup, quand tu as un problème, il ne faut pas dire : 'J'ai le problème parce que la fourche ne fonctionne pas'. Ça n'est pas mon souci de savoir si c'est la fourche ou si ça vient d'ailleurs. [Il faut plutôt] dire : 'J'ai ce problème-là, et à un moment j'ai essayé de piloter différemment mais j'ai eu le même problème'. Donner ces explications et bien décrire ce que je fais en piste, ça permet ensuite aux ingénieurs de chercher au bon endroit. À mon avis, c'est ça qui peut aider le mieux en développement."

"Quand tu as des ingénieurs au top, il faut juste expliquer à quel endroit tu as eu le problème et être le plus précis possible là-dessus, parce qu'en tant que pilote, si tu dis 'il me manque de l'appui', les ingénieurs le comptent mieux que toi et ils savent te l'ajouter si c'est nécessaire. Il faut expliquer ce que tu fais mais pas expliquer à l'équipe ce qu'il faudrait changer."

C'est donc une vraie course de fond que mène Johann Zarco, vécue en équipe avec Joan Mir, Luca Marini et Takaaki Nakagami. Les prochains mois diront si les efforts conjugués de ce quatuor et des ingénieurs de Tokyo arrivent à combler le gouffre de performance qui s'est creusé ces dernières années.

Avec Vincent Lalanne-Sicaud

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